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La « Théorie du Racisme » de René Binet

Par Nicolas Lebourg

René Binet (1913-1957) peut être considéré comme le père français du nationalisme blanc. C’est un de ses personnages d’un rôle si modeste dans l’Histoire, qu’ils en ont le mérite de mieux l’en éclairer. Dans la continuité de la note de lecture précédemment faite à propos du Qu’est-ce que le fascisme ? de Maurice Bardèche, je voudrais présenter à grands traits sa Théorie du Racisme, distribué par Les Wikings, Paris, 1950. Le lecteur pourra ainsi s’en faire une idée complète, au-delà de la courte référence qu’il m’arrive d’y faire de loin en loin depuis vingt ans – on notera au passage que le texte illustre parfaitement la définition que Stéphane François donne du racialisme : certes une théorie de l’inégalité des races, mais aussi du fait que leur affrontement serait le moteur de l’Histoire.

L’ouvrage prétend d’emblée vouloir être l’équivalent du Manifeste du parti communiste, et ne cesse de parodier Karl Marx dans sa volonté de se présenter comme l’orthodoxie nécessaire à « l’avant-garde raciste » (une formule martelée le long des pages et qui témoigne comment le caractère blanquiste de Binet fut sans doute sa constante de l’extrême gauche à l’extrême droite). Conséquemment, il argue que le schéma de l’histoire serait celui de la lutte des races pour leur survie. L’existence des positions de classes est reconnue, mais elles proviendraient du sort de vainqueur ou de vaincu dans la lutte des races. L’affaiblissement du sang produirait celui des places : la bourgeoisie aurait supplanté la noblesse quand cette dernière aurait dégénérée à cause de ses mélanges.

Si paganisme antique aurait été sain, la décadence biologique de l’Empire romain proviendrait du christianisme des races inférieures. La société féodale aurait encore été aryenne. Parce qu’ils méprisaient l’or au profit de l’honneur, les Aryens auraient laissé sa gestion aux Juifs, définis par leur matérialisme rapace. Les Aryens partis de conquêtes en découvertes, les Juifs auraient ainsi le contrôle des moyens de production créés par les Aryens. Le capitalisme ne serait donc qu’une domination temporaire des Aryens par les Juifs. Pour justifier l’ascension au pouvoir d’une race inférieure, les Juifs auraient inventé l’idée de l’égalité des hommes : « Le capitalisme est cosmopolite dans sa doctrine sociale et politique parce qu’il a rompu tous liens avec les bases biologiques des sociétés humaines. »

Le capitalisme juif pousserait au métissage afin d’avoir « une masse toujours plus nombreuse de sous-hommes sans traditions, sans liens politiques (…) une barbarie uniforme ». Dès lors, l’avortement, la licence sexuelle et l’alcoolisme seraient des instruments juifs pour faire dégénérer la race.

Néanmoins, le monde juif aurait ainsi produit le moyen de sa destruction, car l’individualisme et la pauvreté mèneraient à l’anarchie, et créé des métis, qui seraient ingouvernables. De plus, il tendrait « à la domination mondiale, c’est-à-dire à la prolétarisation des nations », et par là ferait croître le nombre des révoltés. In fine, l’inaptitude supposée des juifs au combat, les aurait menés à confier les armées de leur États à d’autres, qui sauront un jour les retourner contre leurs maîtres ;

La situation aurait donc ses mérites. L’homme aryen se battrait donc contre ses maîtres et pour récupérer les moyens de production que sa race aurait forgés. En prolétarisant des nations entières (on est là sur un principe classique de la radicalité de droite de l’entre-deux-guerres), le capitalisme juif permettrait aux « capitalistes nationaux » et aux « travailleurs nationaux » de découvrir que leurs intérêts seraient les mêmes. L’auteur en déduit qu’en toutes choses, « La lutte pour la race est une lutte socialiste et la lutte pour le véritable socialisme est un moyen d’atteindre à la libération de la race. »

De là, sont exposées les éléments de l’utopie définie.

Puisque « l’État est historiquement un moyen d’oppression d’une race sur d’autres races », la révolution raciste verrait l’avant-garde raciste se muer en dictature pour éliminer le pouvoir de la race inférieure. Par sa violence et son énergie, l’État épurera ethniquement son territoire et assurera le retour des allogènes dans leur pays d’origine. Viendra « une ségrégation absolue à l’échelon mondial comme à l’échelon de la Nation. » Puis, la ségrégation faite, il n’y aurait plus de lutte des races et ce serait la fin de l’Histoire. L’unité organique y serait parfaite :

« les antagonismes primitifs ayant disparus au moyen de l’unité au sein de la race, l’Etat, moyen d’oppression, dépérira pour faire place à un simple appareil de direction et d’administration que le socialisme a toujours rêvé mais que, faute de connaître suffisamment les lois du développement historique, il a seulement souhaité et cherché sans le découvrir. »

Le raisonnement se conclut par une proclamation scientiste et des comparaisons avec quelques auteurs antérieurs. Gobineau et Chamberlain ne sont pas mésestimés, mais le véritable « racisme scientifique » serait celui de Georges Vacher de Lapouge. Walter Darré aurait eu l’immense mérite de réussir « la synthèse du socialisme scientifique des hégéliens de gauche et du racisme scientifique », mais ne serait hélas pas parvenu à dégager une philosophie générale de l’Histoire. Les derniers mots sont bien sûr faits pour exalter le lecteur :

« En avant donc, le moment est venu où les nations prolétariennes, où le monde aryen, où l’homme blanc vont secouer leurs chaînes ! »

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