Génération identitaire : et après ?
La question des dissolutions revient régulièrement sur notre site à travers les travaux de Nicolas Lebourg à ce sujet. Ces derniers mois ayant été plutôt riches en la matière, cela l’a mené à intervenir tant à l’automne à propos du CCIF que récemment quant à Génération identitaire.
La publication du décret mercredi dernier a donné lieu à quelques interventions, en voici trois (audio, textuelle, vidéo) :
Φ Sur France Inter, « Le mot de la semaine », 7 mars 2021 :
Φ Un entretien dans Libération, propos recueillis par Pierre Plottu et Maxime Macé : « Génération identitaire : «Le ministère de l’Intérieur a voulu montrer que ce n’était pas qu’une dissolution politique»« , 4 mars 2021.
Pourquoi le décret de dissolution de GI insiste-t-il en premier lieu sur la dimension idéologique, l’incitation à la haine raciale, pour motiver son interdiction ?
Cette dissolution est particulièrement valable sur les éléments idéologiques mis en avant par le ministère de l’Intérieur : l’incitation à la haine et à la violence. Dans son corpus idéologique, Génération identitaire admet totalement la discrimination, c’est même son utopie politique : le groupe veut parvenir à organiser une communauté solidaire et épurée culturellement et ethniquement. Il y a là une vraie contravention à la législation française et il était donc tout à fait logique que le décret commence par ça.
Ce point idéologique est ensuite contrebalancé par la question de la violence et de la formation paramilitaire de Génération identitaire et donc de l’atteinte à l’Etat de droit, arguments tout à fait recevables par l’électorat de droite auquel la majorité essaye de parler actuellement. Le ministère de l’Intérieur a ainsi voulu montrer que ce n’était pas qu’une dissolution politique, pour parer les reproches d’une partie de la presse de droite.
Chacun sait toutefois qu’une dissolution est un acte politique que l’on habille juridiquement. Les identitaires ne sont ainsi pas dissociés du nationalisme blanc et c’est la vraie question de cette dissolution : est-ce que Génération identitaire en est la forme acceptable dans le débat politique ? Le gouvernement a tranché : c’est non.
Le décret précise pourtant aussi que «la doctrine de “préférence nationale”» est «de nature politique»…
Ce décret précise que GI ne se limite pas à la «préférence nationale» mais y ajoute un caractère ethnique. Pour autant, préciser que «la préférence nationale» est «politique» pose question car celle-ci est, au niveau juridique, contraire au bloc de constitutionnalité. C’est l’un des problèmes majeurs du programme du Rassemblement national, que Marine Le Pen contourne en disant «on va changer la Constitution». Mais on ne peut pas «réformer» ce bloc de constitutionnalité. C’est donc étonnant de retrouver cette mention dans un décret signé par le président de la République.
Seule l’association «Génération identitaire» est visée par la dissolution. Cela expose-t-il les autres structures qui gravitent autour du groupe à des poursuites si elles continuent leurs activités ?
Je pense qu’il n’y en aura pas. Si le GUD était le mouvement de jeunesse d’Ordre nouveau puis d’Unité radicale, il n’a pas été dissous en même temps que ces dernières par exemple. Dans le cas de GI, et au contraire du Bastion social en 2019, il n’y a pas de dissolution en cascade : seule l’association «mère» est dissoute et les autres structures peuvent continuer leurs activités, probablement pour laisser une porte de sortie pour les militants.
Cependant, «en même temps», le décret mentionne bien les lieux de sociabilité de GI, ce qui tend à montrer que la poursuite des activités de ces bars associatifs et autres salles de boxe sera très surveillée…
Φ Sur BFM, le 3 mars 2021 :