Marine Le Pen face aux municipales 2020

Source inconnue
Le Point des 23-30 janvier 2020 a demandé à Nicolas Lebourg ce qu’il avait pensé du discours de Marine Le Pen prononcé le 12 janvier 2020 pour lancer la campagne de son parti aux élections municipales de 2020 – sous le titre « Une critique de la métropolisation » en version papier. Nous reproduisons ci-dessous son texte, et, en-deçà, la vidéo ainsi commentée :
Sur le fond comme sur la forme, ce discours de Marine Le Pen est très structuré. Elle s’adresse à ses troupes d’une façon qui évoque ce que le politiste Xavier Crettiez nomme » l’escapisme révolutionnaire » : alors que militer pour une campagne municipale est une chose assez anodine en démocratie, elle en fait une » aventure hors du commun » et un » parcours initiatique nécessaire » forgeant » une nouvelle élite » pour le » grand réveil des peuples « – formule qui, ici, renvoie aux progressions électorales des partis d’extrême droite mais que le FN utilise depuis la chute du mur de Berlin pour affirmer que le sens de l’Histoire est celui du combat des identités contre le » mondialisme « . Cette galvanisation est soutenue par une certaine musicalité du propos, où la présidente du RN fait rimer » alternance » et » exigence « , et assure que son parti a ramassé le » drapeau » dans le » ruisseau « .
Cette stylistique n’est pas vaine, elle a pour but de donner un sens à la politique. Marine Le Pen en fait une épopée libératrice où, comme jadis les partis d’extrême droite européens ou les mouvements de libération nationale dans les pays colonisés par les Européens, le groupe politique affirme ne pas seulement représenter un groupe mais » conduire le peuple à la victoire « . Elle oppose deux projets politiques. L’ennemi, c’est à la fois le » nomadisme « , le » mondialisme » et le » progressisme « , selon un point de vue ancien à l’extrême droite, mais elle ajoute la » métropolisation « . La critique des politiques de métropolisation menées sans débat démocratique a été au coeur des succès du FN au premier tour des régionales de 2015. Mais le soir même, les commentateurs polémiquaient sur l’islam en lieu et place de ce sujet.
Ici, Marine Le Pen fait de la protection un thème global, pris dans sa dimension policière, car c’est toujours un sujet porteur pour le FN, mais aussi en dénonçant » l’insécurité sociale » du macronisme. Elle préconise une » démétropolisation » et le » localisme « . La critique de la ville-monde Paris (le RN n’y a aucune chance), plus soucieuse des autres villes-mondes que des villes françaises, lui permet de prôner une incitation fiscale au déménagement d’entreprises des métropoles vers les zones délaissées : c’est une idée qui lui permet de lier campagne des municipales et de la présidentielle.
En somme, elle transforme sa sociologie électorale (classes populaires du secteur privé, zones rurales, etc.) en camp politique des outsiders de la mondialisation qu’elle mènerait contre la » start-up nation » d’Emmanuel Macron